Liberté des médias en RDC : Les journalistes face à la censure
La récente suspension indéterminée du journaliste Jessy KABASELE par le Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC) met en lumière les défis auxquels sont confrontés les médias en République Démocratique du Congo (RDC). Cette sanction, consécutive à une interview avec le célèbre chanteur Koffi OLOMIDE dans l’émission “Le Panier”, The Morning Show sur la Radio-Télévision nationale congolaise (RTNC), soulève de sérieuses questions sur la liberté de la presse dans le pays.
Lors de cette interview, Koffi OLOMIDE a ouvertement critiqué la réponse militaire du gouvernement face aux attaques du groupe rebelle M23, soutenu par le Rwanda. Ces critiques, jugées déstabilisantes par le CSAC, ont conduit à l’accusation de Jessy KABASELE pour ne pas avoir recadré les propos de l’artiste. Selon le CSAC, les commentaires de Koffi OLOMIDE « sapaient les énormes efforts et sacrifices consentis par le Gouvernement de la République ».
Le CSAC a également convoqué ce journaliste et l’artiste pour répondre de ces déclarations. Les avocats du chanteur auraient rencontré un procureur le 15 juillet, signalant une possible escalade judiciaire.
Depuis la reprise des hostilités au Nord-Kivu en 2022, le gouvernement congolais lutte contre le M23, et le conflit a accru la pression sur les journalistes. En février, le CSAC a émis une directive stricte demandant aux médias de ne pas diffuser de débats sur les opérations militaires sans la présence d’un expert, et d’éviter les émissions à téléphone ouvert sur ce sujet. De plus, il a été demandé de ne pas interviewer les « forces négatives », un terme vague laissant place à des interprétations arbitraires.
En avril, une autre directive a été émise, demandant aux médias de s’en tenir aux sources officielles pour toute information relative à la rébellion dans l’Est de la RDC. Ces restrictions sont perçues comme une tentative de contrôle accru de la narration médiatique par le gouvernement.
Le droit international en matière de droits humains permet certaines dérogations à la liberté d’expression en période d’urgence, mais ces dérogations doivent être juridiquement claires, nécessaires et proportionnées. Les actions du CSAC ne respecteraient pas ces normes, menaçant ainsi l’essence même de la liberté d’expression.
L’affaire de Jessy KABASELE et Koffi OLOMIDE n’est pas un cas isolé. De nombreux journalistes en RDC, notamment ceux opérant dans les provinces de l’Est, exercent leur métier sous des conditions périlleuses. Leurs efforts pour informer le public devraient être protégés et soutenus, plutôt que réprimés.
Au lieu de punir ceux qui critiquent la gestion de la crise, les autorités congolaises devraient garantir que les journalistes puissent travailler librement et en toute sécurité. Le respect de la liberté de la presse est crucial pour une société démocratique et la gestion transparente des conflits.
LA RÉDACTION
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